Dans l'antre chaleureuse et tamisée de la grand-mère viking, un sanctuaire de légendes et de mystères, les huit petits enfants se blottissaient chaque soir, leurs yeux brillant d'anticipation. La vieille, voûtée mais l'esprit aussi vif que l'éclair, détenait un trésor inestimable, une bibliothèque vivante de récits mythologiques, transmise de génération en génération. Ce soir-là, l'atmosphère était imprégnée d'une expectative particulière. La grand-mère, avec sa voix rauque et enveloppante, semblable au vent dans les branches d'Yggdrasil, commença à narrer l'histoire du serpent-dragon Jormungand, un monstre redouté, enfanté par Loki, serpent gigantesque encerclant le monde.
Mais, ah, elle avait une tournure différente à offrir, un éclairage nouveau sur cette créature souvent dépeinte comme l'incarnation du mal. Avec ses mots choisis, aussi tranchants et précis que des runes gravées dans la pierre, la grand-mère peignait Jormungand non pas comme un monstre, mais comme un gardien, un équilibreur des forces cosmiques. "Écoutez, mes petits", disait-elle, "dans l'immensité de cet univers, chaque être a sa place, chaque créature son rôle à jouer. Jormungand, avec sa force immense, maintient l'équilibre du monde, empêchant les océans de déborder et de submerger la terre."
Les enfants, captivés, suivaient chaque mot, chaque geste de leur aïeule. Dans ses histoires, le serpent-dragon n'était plus simplement un monstre terrifiant, mais un symbole de protection, de la puissance nécessaire pour maintenir l'ordre dans un monde où les forces de la nature pouvaient être aussi destructrices que créatrices. "Sans Jormungand", poursuivait-elle, "les mers se déchaîneraient, les terres seraient englouties, et notre monde serait plongé dans le chaos."
La grand-mère, avec l'art d'une véritable skald, tissait l'histoire, insufflant vie et nuances dans chaque personnage, chaque événement. Les enfants, suspendus à ses lèvres, découvraient un aspect méconnu de la mythologie, un côté plus humain, plus profond des légendes ancestrales. Dans les yeux de chacun d'eux se reflétait non seulement la lumière du feu crépitant, mais aussi la flamme de la compréhension, du respect pour les forces anciennes et mystérieuses qui régissaient leur monde.
Ainsi, soir après soir, la grand-mère tissait son réseau de récits, éduquant les jeunes esprits non seulement sur les sagas et les héros, mais aussi sur la sagesse, la complexité et la beauté du monde qui les entourait, un monde où même un serpent-dragon redouté pouvait être vu sous une lumière positive, comme gardien de l'équilibre universel.
